La hausse du chômage depuis le début des années 2000 est loin d’avoir eu la même ampleur selon les catégories sociales. Le nombre de chômeurs a augmenté de 400 000 au total entre 2007 et 2017 selon l’Insee1. Parmi eux, les trois quarts (310 000) étaient ouvriers ou employés. Au cours de la même période, le nombre de chômeur a augmenté de 35 000 chez les cadres.
Il est trop tôt pour tirer des enseignements de la baisse du chômage qui a lieu depuis 2016. Seuls les employés semblent moins en bénéficier, avec un taux de chômage qui diminue très peu. En revanche, la part d’ouvriers non qualifiés au chômage a baissé de 20,6 % à 18,4 % ce qui signifie que la reprise profite aussi aux moins qualifiés.
Les ouvriers non qualifiés se distinguent
Si l’on prend un peu de recul, l’évolution du taux de chômage par catégorie sociale distingue clairement les ouvriers non qualifiés. Leur taux de chômage, déjà de l’ordre de 10 % en 1982, n’a quasiment pas cessé d’augmenter jusqu’en 1999, pour atteindre 17 %. Ce chiffre a diminué les deux années suivantes, mais il est reparti très vite à la hausse pour toucher désormais plus d’un ouvrier non qualifié sur cinq. Les ouvriers et les employés se situent à un niveau intermédiaire. Leur taux oscille depuis les années autour de 9-10 %, niveau atteint par les ouvriers dès la fin des années 1980 et par les employés dix ans plus tard. Enfin, les professions intermédiaires et cadres supérieurs ont connu une détérioration nette au milieu des années 1990, mais demeurent bien en deçà des catégories populaires : ils comptent respectivement 4,7 % et 3,3 % de chômeurs dans leurs rangs en 2015.
Dans un pays qui survalorise le titre scolaire, le manque d’emploi frappe d’abord les moins qualifiés. Aux Trente glorieuses ont succédé trente années de dégradation pour les ouvriers non qualifiés. Des générations déjà anciennes de populations peu diplômées, nées à partir de la fin des années 1960, n’ont connu que le chômage de masse. Difficile dans ce cas de continuer à parler de « crise » : c’est une situation de déséquilibre structurel, un nouveau régime, qui s’est installé sur le marché du travail et il frappe essentiellement les moins favorisés.
L’amélioration de la situation pour les moins diplômés ne passe pas uniquement par la création en masse d’emplois peu qualifiés. Sur le marché du travail, il se crée un processus de file d’attente. Une partie des emplois peu qualifiés sont occupés par des sur-diplômés déclassés et au bout de la file il ne reste plus que Pôle Emploi. La création d’emplois qualifiés réduit le déclassement et « aspire » vers le haut l’ensemble de la population active.
Notes:
- Dans cet article, nous ne considérons que les chômeurs des catégories salariées. ↩