Depuis les générations nées à la fin des années 1940, la famille se structure de plus en plus autour du modèle du couple avec deux enfants où les deux parents travaillent. La part de femmes ayant eu deux enfants a fortement progressé, de moins d’un quart pour celles nées au milieu des années 1920 à 40 % pour celles nées à partir de la fin des années 1940. Ce modèle est le plus répandu, même s’il n’est pas majoritaire. La part de femmes n’ayant pas eu d’enfant a très fortement diminué dans toute la première partie du siècle. Elle est passée de 23 % à 10 % pour les femmes nées des années 1900 à 1940. Pour les générations suivantes1, a augmenté jusqu’à 15 % selon des estimations récentes et encore provisoires de l’Ined (voir notre second graphique). La vie en couple avec un ou des enfants demeure un modèle très largement dominant dans nos sociétés (lire notre article).
La part des femmes ayant eu un seul enfant a légèrement diminué des générations nées entre 1900 jusqu’au milieu des années 1920, puis s’est stabilisée aux alentours d’une femme sur cinq. Elle a baissé à nouveau pour les femmes nées après 1970. La part de femmes ayant eu trois enfants a progressé de 14 % à 21 % entre celles nées dans les années 1910 et celles nées au milieu des années 1930, pour se maintenir à ce niveau par la suite. La proportion de familles nombreuses a décliné fortement à partir des générations nées à la fin des années 1920 et jusqu’à celles nées au milieu des années 1940. On enregistre d’abord une baisse des familles de cinq enfants ou plus, puis de quatre enfants. Depuis les générations des années 1950, la part de femmes ayant eu au moins quatre enfants demeure stable, autour de 10 %.
Une grande partie de ces transformations a eu lieu pour les générations de femmes nées entre le milieu des années 1920 et le milieu des années 1940. En gros, celles qui ont fondé des couples au cours des Trente Glorieuses, de l’après Seconde Guerre mondiale à la fin des années 1960, qui ont vécu la forte croissance économique, et l’effervescence culturelle des années 1960 et 1970. Des générations de femmes de plus en plus diplômées, qui sont entrées sur le marché du travail et ont mieux contrôlé le nombre d’enfants qu’elles souhaitaient avoir, grâce aussi aux nouveaux moyens de contraception. Le déclin de l’emprise des normes religieuses traditionnelles a joué, en particulier sur la baisse des familles nombreuses. Pour les générations suivantes, nées entre la fin des années 1940 et 1960, on note une grande stabilité. Le modèle de la famille avec ses deux enfants n’est pas devenu hégémonique, la famille nombreuse ne décline plus et la part de femmes sans enfant n’augmente guère. Pour les générations nées de 1960 à 1980, la part de ces dernières augmente légèrement, au détriment des femmes ayant eu un enfant unique.
Au final, les évolutions économiques, sociales et culturelles semblent avoir peu d’impact sur la composition de la famille. L’évolution des valeurs et l’emprise de l’activité féminine rendent peu probable le retour à des familles plus nombreuses. Certes, la part de femmes n’ayant pas eu d’enfant augmente récemment, mais de manière modeste. Au bout du compte, la descendance finale (le nombre moyen d’enfant par femmes à la fin de leur vie féconde) diminue un peu mais demeure autour de deux enfants par femme (voir notre article).
A un instant donné, la famille avec un seul enfant reste majoritaire Quand on observe les familles avec enfant(s) toutes générations confondues une année donnée, celles qui n'ont qu'un enfant restent majoritaires : elles représentent 45 % des familles, contre 39 % pour celles avec deux enfants, 13 % avec trois enfants et 4 % pour quatre ou plus. Le modèle familial de long terme n'est pas équivalent à la composition des familles à un moment donné, pour une raison simple : pour avoir deux enfants, il faut déjà en avoir eu un... Et les données instantanées rassemblent des jeunes couples et d'autres beaucoup plus âgés. Pour comprendre les modèles familiaux, il faut donc observer le nombre d'enfants qu'ont eu des générations de femmes (voir plus haut) sur longue période. Il faut tout de même nuancer ces données, car une même femme peut avoir eu des enfants de différents partenaires (et inversement pour les hommes). Les recompositions bousculent les schémas familiaux, par exemple quand des enfants de différents couples se réunissent (parfois pour des congés, parfois plus durablement), des familles nombreuses se recomposent.
Notes:
- Les données pour les générations nées après 1960 sont issues de l’Ined et diffèrent légèrement. ↩