Le taux de pauvreté au seuil à 60 % du niveau de vie médian (1 000 euros pour une personne seule) dépasse 40 % dans les 1 400 quartiers les plus pauvres de France, dit « prioritaires » et qui représentent 8 % de la population totale1. Ce chiffre est un ordre de grandeur puisque les données officielles datent de 2013 (voir encadré). En comparaison, le taux de pauvreté des villes qui comprennent au moins un quartier prioritaire est inférieur à 17 %2, 2,6 fois moins. Si l’on utilise le seuil plus restrictif de 40 % du niveau de vie médian (670 euros pour une personne seule), la pauvreté atteint 13 % dans les quartiers prioritaires, contre 5 % pour le reste des villes.
L’Etat est avare en matière d’informations sur les niveaux de vie de ces quartiers, mais on sait que ces données moyennes cachent de grandes disparités. En particulier chez les jeunes : le taux de pauvreté des moins de 18 ans dépasse dans ces territoires les 50 % (données 2012). On regroupe des quartiers qui se trouvent dans des situations très différentes. L’ensemble « Franc Moisin-Cosmonautes », qui va d’Aubervilliers à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), rassemble plus de 110 000 habitants. Il n’a pas grand-chose à voir avec le quartier « Egalité » qui en comprend moins de 500 à Champigny-sur-Marne (Val-de-Marne). Dans le quartier « Pissevin » de Nîmes (Gard), où vivent plus de 15 000 personnes, le taux de pauvreté est de 69 %, ce qui est trois fois plus qu’à « Notre Dame » à Gardanne (1 200 habitants, Bourches-du-Rhône).
Il faut rester prudent dans l’analyse des quartiers prioritaires qui mélangent des territoires qui n’ont pas grand chose à voir. D’un côté, des quartiers de très petite taille, souvent autour de 1 000 habitants, qui peuvent parfois connaître un niveau de pauvreté très fort (comme les 80 % de pauvres à la Résidence social Nicéa de Nice) et de très grands ensembles du nord-est parisien, de Marseille, de Lille-Roubaix, de Mulhouse ou de Toulouse notamment, comportant tous plus de 30 000 habitants et qui constituent des villes à l’intérieur de la ville. Enfin, il ne faut pas oublier que ces quartiers ne regroupent qu’une fraction très faible de la population totale. Même avec un taux très élevé de pauvreté, ils ne rassemblent qu’un quart de la population pauvre. L’assimilation quartiers prioritaires = territoire où vivent les plus pauvres est très trompeuse.
De pauvres données sur les pauvres. Les quartiers prioritaires ne sont pas une priorité de la statistique publique. Les données globales sur la pauvreté dans ces quartiers datent de cinq ans. Il est impossible de dire comment ils ont évolué depuis. Les modifications intervenues dans leur délimitation en 2015 interdit aussi de mesurer les évolutions antérieures. Cette situation alimente la confusion et les exagérations sur ces territoires.
Notes: