Par définition, on ne dispose pas de données précises sur le nombre d’étrangers en situation irrégulière vivant en France. Une façon de l’approcher est de comptabiliser les titulaires de l’aide médicale d’Etat (AME), proposée aux personnes résidant depuis au moins trois mois en France, quelle que soit la régularité de leur statut. Selon la Caisse nationale d’assurance maladie, 439 000 personnes recevaient cette aide en juin 2023, en cas de maladie.

Ce chiffre est imparfait. Il comprend des étrangers qui ont été régularisés, mais qui n’ont pas encore fait de demande d’assurance maladie universelle à laquelle ils ont droit. Inversement, toutes les personnes sans titre de séjour ne demandent pas l’AME. Le chiffre total d’étrangers en situation irrégulière est probablement supérieur. S’il était de 600 000, comme l’a indiqué en 2021 le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, les sans-papiers représenteraient 1 % de la population. Une donnée invérifiable.

Le terme de sans-papiers regroupe tout un ensemble de situations : des enfants (parfois nés en France) et des parents, des mineurs isolés, des personnes qui viennent d’arriver et des personnes établies sur notre sol depuis des années. Il inclut aussi toutes celles et ceux dont le dossier de régularisation est en attente, qui peuvent avoir perdu leur droit au séjour de manière temporaire à cause d’un problème administratif.

Chaque année, un chiffre indéterminé de personnes entrent en France sans titre de séjour. La pauvreté et le mal-développement des pays du Maghreb et d’Afrique subsaharienne poussent notamment un certain nombre de jeunes notamment à tenter leur chance pour éviter la misère dans leur pays. Les crises politiques et humanitaires, les conflits locaux (Syrie, Libye, Soudan, Haïti, Afghanistan, etc.) accentuent encore ces flux.

Un chiffre tout autant indéterminé de sans-papiers quittent le sol français pour aller s’établir dans un autre pays, et entre 20 000 et 30 000 sont renvoyés, soit dans leur pays d’origine, soit dans le pays par lequel ils sont entrés dans l’Union européenne. Un nombre à peu près équivalent est régularisé, variable suivant les années. L’amplification de la lutte contre le séjour irrégulier en France à partir du milieu des années 2000 a conduit à la fois à davantage de renvois, mais aussi, même si cela paraît paradoxal, de régularisations. Une partie des personnes interpellées ont obtenu gain de cause, et un certain nombre d’étrangers en situation irrégulière, qui ne demandaient pas de titre de séjour, régularisent leur situation souvent après de longues années d’attente.

La France a toujours connu sur son sol une population étrangère en situation irrégulière. Il est impossible de savoir si leur nombre augmente ou diminue. Il varie notamment en fonction des crises majeures qui secouent la planète, comme dans les années 1930 avec les Espagnols et les Italiens notamment, à la fin des années 1970 avec le Vietnam, dans les années 1990 et 2000 avec l’ex-Yougoslavie ou le Rwanda, etc. Les crises plus récentes touchent pour beaucoup les pays africains. Les sans-papiers ont régulièrement été utilisés comme boucs émissaires des difficultés sociales de notre pays par une partie croissante des partis politiques français. Faute d’avoir accès au travail, ces personnes vivent le plus souvent dans des situations extrêmement précaires. Plusieurs milliers d’enfants étrangers dorment ainsi à la rue.

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