Pas moins de 9 200 personnes ont mis fin à leurs jours en 2022, selon l’Inserm1, soit 3 000 de moins que trente ans plus tôt. Le taux de suicide (nombre de décès rapporté à la population) a très nettement diminué depuis le début des années 1980, passant de 32 à 21 pour 100 000 chez les hommes et de 12 à 6 pour 100 000 chez les femmes. Le taux revient ainsi à son niveau des années du milieu des années 1970. La période 1975-1985 avait été marquée par une nette hausse.

Il est particulièrement complexe d’établir un lien entre la situation économique ou sociale et le suicide. Il semble notamment difficile de faire un lien avec le chômage ou la précarité de l’emploi. Le suicide résulte de la perte de repères, de règles structurant le comportement des individus, qui peut exister aussi en période de croissance et de remise en cause des normes sociales. En phase de crise, chacun cherche plutôt à se préserver2.

La baisse du taux de suicide tendrait plutôt à montrer que nos sociétés ne sont pas en phase de « désintégration » sociale ou de dépression collective comme on le dit souvent. Elle peut aussi résulter de manière plus directe d’une meilleure prise en charge de la fin de vie chez les personnes âgées : 20 % des suicides sont le fait de personnes de plus de 75 ans, surtout des hommes (voir encadré). Fréquemment des personnes âgées qui ne souhaitent plus vivre compte tenu, notamment, de leur perte d’autonomie.

La tendance à la diminution doit être nuancée. Un taux moyen en baisse peut masquer des phénomènes de sens inverse. La montée et la persistance de la précarité et de la pression dans le monde du travail peuvent avoir un impact si les attentes d’une partie des salariés sont trop en décalage avec leur vie quotidienne. Cet effet n’est pas forcément visible si la situation de certaines catégories s’améliorent. Les moyennes peuvent être trompeuses. Malheureusement, on ne mesure pas l’évolution du taux de suicide selon les catégories sociales.

Comme le note le ministère de la Santé, depuis le milieu des années 2010, le taux de suicide stagne, comme si un plancher avait été atteint. Pourtant, la France peut mieux faire. Notre pays reste – avec la Belgique et la Finlande – l’un de ceux où la mortalité par suicide est la plus élevée. Les suicides représentent 13 cas de décès sur 1 000, contre dix en Allemagne et six en Italie. On ne peut que constater que les politiques de prévention du suicide sont beaucoup moins développées en France que la prévention routière ou la lutte contre le tabagisme par exemple.

Suicide : surtout des hommes âgés

Le taux de suicide des femmes est 3,3 fois moins élevé que celui des hommes (6,3 contre 20,8 p 100 000). Les trois quarts des suicides sont le fait des hommes. Chez les moins de 25 ans, le taux atteint 1,6 pour 100 000 chez les femmes et 3,2 p 100 000 chez les hommes, contre respectivement 11,3 et 83,1 pour 100 000 après 85 ans. En revanche, chez les jeunes, beaucoup moins concernés par les maladies, le suicide est l'une des premières causes de mortalité. 

 

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Notes:

  1. Le ministère de la Santé estime que ces données sont sous-estimées d’au moins 10 %.
  2. Le nombre de suicides est très faible durant les guerres.