L'espérance de vie progresse, l'inégalité entre hommes et femmes diminue, mais les écarts entre catégories sociales demeurent stables. Entre la période 1976-1984 et 2009-2013, l'espérance de vie des hommes à l'âge de 35 ans est passée de 37,8 à 44,5 années selon l'Insee1, soit un gain de 6,7 ans, celle des femmes de 45 à 50,5 années, une hausse de 5,5 ans.

Cette durée de vie moyenne masque des inégalités importantes entre groupes sociaux. A 35 ans, un cadre supérieur peut espérer vivre 49 ans dans les conditions actuelles de mortalité, contre 42,6 ans pour un ouvrier. Une femme cadre peut compter vivre 53 ans, contre 49,8 ans pour une ouvrière. Au total, l'écart entre cadres et ouvriers est resté stable entre la fin des années 1970 et les années 2010 : six ans chez les hommes, trois ans chez les femmes. Sur la base d'un départ en retraite à 62 ans, les cadres peuvent compter en profiter durant 22 ans contre 15,6 ans pour les ouvriers, souvent dans de meilleures conditions de santé pour les premiers.

De nombreux facteurs expliquent les inégalités sociales d'espérance de vie. Les catégories favorisées, souvent mieux couvertes par leur assurance complémentaire, accèdent à des soins plus onéreux, de meilleure qualité. Mais ce phénomène ne joue qu'à la marge, sinon les femmes ouvrières auraient une espérance de vie beaucoup plus faible. Les moins qualifiés commencent à travailler plus tôt et occupent des emplois plus durs physiquement, qui usent, notamment pour les hommes. Enfin, les habitudes de vie jouent : les milieux sociaux ne portent pas la même attention à leur corps, qu'il s'agisse d'alimentation, de tabagisme ou de prévention. Les ouvriers sont deux fois plus souvent fumeurs que les cadres par exemple. Dans les métiers physiques notamment et chez les hommes, l'endurance à la douleur est valorisée (parfois obligatoire pour ne pas perdre son travail) et conduit parfois à des soins tardifs.

Un rapprochement est possible entre catégories sociales : les femmes ouvrières vivent moins longtemps que les femmes cadres, mais leur espérance de vie est supérieure à celle des hommes cadres. Davantage de prise en compte de la pénibilité physique du travail et des politiques de prévention chez les hommes en particulier, à long terme, devraient avoir un impact. Enfin, ces données légitiment un système de retraite davantage fondés sur une durée de cotisation qu'un âge de départ.

 

Notes:

  1. "Les hommes cadres vivent toujours six ans de plus que les ouvriers", Insee première n°1584, Insee, février 2016.